Jusqu’au début du XXème siècle, la batellerie occupait une place prépondérante dans le développement économique du bassin de la Dordogne et les échanges entre les territoires amont et aval se faisaient majoritairement par voie d’eau.
A cette époque, les « gabares » dans leurs différentes configurations (courpet, coureau, Gabare de Gironde, …) permettaient le transport des marchandises depuis le village d’Argentat jusqu’à la ville de Bordeaux via l’estuaire de la gironde. Plus en amont, sur la haute Dordogne, la navigation descendante de petites embarcations était possible mais sous certaines conditions.
La Rivière Dordogne était naturellement une voie de communication importante. Très souvent les Hommes se déplaçaient d’une rive à l’autre, entre deux villages voisins, à l’aide de petites barques en bois à fond plat (les gabarots) encore largement utilisées par de nombreux pêcheurs de la Dordogne aujourd’hui.
Un savoir-faire qui se perd
De par leur envergure (plus de 5m de long pour 1,20 m de large) et leurs deux extrémités pointues, ces barques à fond plat, particulièrement stables, sont idéales pour la pêche aux engins qui nécessitent la présence de deux personnes par embarcation. Disposés aux deux extrémités, chacun des pêcheurs a un rôle bien prédéfini : positionné à l’arrière, le conducteur dirige la barque à reculons, permettant ainsi à la personne positionnée à l’avant de poser l’engin de façon précise et méthodique à l’extrémité avant de l’embarcation.
Mais alors que ces barques en bois à fond plat sont encore très prisées des pêcheurs, notamment du fait de leur ergonomie, il est de plus en plus difficile de trouver des artisans qui en fabriquent encore. Un des maîtres en la matière, Roland Plagne, habitant la commune lotoise de Bétaille, a maintenant 80 ans passé.
On constate d’ailleurs une raréfaction de ces bateaux aux points d’attaches traditionnels, notamment car ils sont facilement remplacés, du moins par certains pêcheurs à la ligne, riverains et promeneurs, par des barques en matière plastique, moins élégantes mais plus facile à mettre à l’abri après usage.
A noter que l’essence de bois idéale pour ce type de barque est le saule blanc (salixalba) qui est devenu rare. A défaut le peuplier est utilisé.
Une dynamique commune
Face à la réelle difficulté de se procurer des barques de qualité et avec la crainte d’une perte des savoir-faire, les membres de l’Association des Pêcheurs aux Filets et aux Engins de la Rivière Dordogne ont décidé de se lancer dans la fabrication de leurs propres barques de pêches.
A peu près au même moment, les organisateurs de courses de barques traditionnelles lors des fêtes votives de villages (Creysse en particulier) se plaignaient de voir le nombre des candidats engagés limités par la rareté des barques.
C’est donc de la rencontre entre les membres de l’Association des Pêcheurs aux Engins de la Dordogne et le Comité des Fêtes organisateur de la course en barques de Creysse (10ème anniversaire en 2017 mais déjà renaissante dans les années 1970) qu’est né un projet d’atelier de construction de barques à fond plat.
C’est autour d’un objectif commun mais des raisons différentes, que des membres de l’Association des Pêcheurs aux Filets et aux Engins de la Rivière Dordogne et du Comité des Fêtes de Creysse se sont réunis à l’automne 2016 pour fixer un lieu, évaluer le matériel et les fonds nécessaires à l’organisation de cet atelier.
Un mois plus tard, une équipe déterminée et appliquée se retrouvait pour une journée de formation à la construction de gabarot, sous la direction de Jean-Paul Fouquet (Magnague – Carennac) qui réalise ses propres bateaux et dispose du matériel nécessaire pour leur construction